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Fruits d’automne - 16

samedi 19 octobre 2019, par Véronique Garcia Pays

Les fruits comestibles des arbustes sauvages

Début de saison dans les haies champêtres :
Les arbustes sauvages portent des fruits comestibles qui mûrissent à l’automne vers le mois d’octobre. Les prunelles, cenelles, nèfles et cynorrhodons sont leurs noms pittoresques et parfois méconnus. Très astringents, et souvent durs, il deviennent comestibles après avoir subis les premières gelées d’automne. Les fruits blets se ramollissent et perdent leur âpreté. Il n’y a que la cenelle, cueillie sur l’aubépine à deux styles (Crataegus laevigata) que j’ai pu manger au mois d’août au stade de la maturité. Saveur douceâtre qu’il me reste à tester dans une recette de dessert. Ces fruits ont deux noyaux, et sont plus gros que les cenelles à un seul noyau de l’aubépine à 1 style (Crataegus monogyna). Les autres fruits, je les ramasse et je leur fais un petit traitement au froid grâce à mon assistant, le congélateur, aussi efficace que la gelée automnale. Les prunelles décorent les branches touffues du prunellier d’une abondance de boules bleues dans les friches et les haies, le plus souvent en milieu calcaire. Prévoir une cotte de maille pour rentrer dans les buissons couverts de longues épines acérées, ou cueillir sagement les fruits en façade, c’est plus prudent. Elle est réputée pour son eau de vie.

Personnellement je « kieffe » pour la nèfle et le cynorrhodon depuis que je les ai préparés en dessert. Le néflier d’Europe ( Mespilus germanica) n’a rien à voir avec le néflier du Japon, aux fruits jaunes et acidulés plus proches des pêches et des abricots. Cet arbrisseau a été introduit à l’époque des Romains et il s’est naturalisé dans les haies champêtres bien ensoleillées, car il apprécie la chaleur pour se reproduire. On en trouve dans le sud du Massif Central par exemple. La nèfle est un fruit rebondi qui ressemble à une petite poire brune avec une couronne de feuilles sèches (les restes des sépales de la fleur). L’épluchage de son épiderme épais est plutôt facile quand il est blet… le challenge consiste à extirper les gros pépins noyés dans la pulpe molle. Une fois la pulpe séparée de la peau et des graines, la purée crue obtenue est un délicieux ingrédient pour fourrer des gâteaux moelleux. Saveur fine avec des notes de châtaigne.

Les haies sont un vrai réservoir de fruitiers sauvages !
Les cynorrhodons sont ces beaux fruits orangés ou rouges qui apparaissent sur les églantiers (Rosa canina). Comme tout rosier qui se respecte, ils portent des aiguillons courbes qu’il faut surveiller pour ne pas laisser son pull épinglé sur les branches ! Ne taillez pas pour autant l’églantier : contrairement aux espèces cultivées, il supporte très mal ce traitement et risque de dépérir (c’est la cause de sa disparition des haies actuelle). La récolte se fait à ses risques et périls en vue de déguster une saveur proche de l’abricot. Le goût en vaut la peine mais aussi la richesse en vitamine C de ce fruit, qui dépasse de beaucoup celle du citron. On le fait cuire en purée à basse température pour la préserver, en ajoutant du sucre pour faire une confiture, ou nature pour incorporer à des mets salés. Juste un dernier détail à résoudre lors de leur préparation...Ces beaux fruits sont poursuivis par une rumeur douteuse, celle de gratte-cul ! Il paraît que chez eux, les graines sont fournisseurs officiels de poils à gratter. Il vaut mieux retirer soigneusement les graines poilues enfermées dans les petites urnes des fruits avant de les utiliser en cuisine. Presse-fruit, couteau, quelle que soit la méthode, c’est l’école de la patience pour les gourmets.

La liste des fruits sauvages à déguster est encore longue :
Les sorbiers proposent les alises et les cormes, dans le Midi, les amélanchiers, et en bord de mer, les argousiers nous lancent l’invitation !

NDLR : Un rapide petit tour de la ferme en cette période automnale nous a permis de trouver ces petits fruits que l’on ne remarque même plus. Il est vrai qu’une forte gelée tardive les a un peu décimé (-6 le 6 mai). J’ajouterai à ce qui en est dit dans cet article que des essais de lactofermentations sur ces fruits m’ont réservé de très belles surprises gustatives (cf article sur la prunelle)
L’alise de l’alisier des bois (Sorbus torminalis L. Crantz)
La nèfle (Mespilus germanica L.)
L’azérole de l’azerolier (Crataegus azarolus)
La prunelle (Prunus spinosa)
Le cynorodhon (Rosa canina L.)

Les fruits secs des bois

Parmi les récoltes automnales, plusieurs fruits sauvages sont comestibles pour les gourmands. En forêt, les glands représentent une source de nourriture importante pour peu que l’on passe du temps à leur préparation. Pour les Celtes, ils étaient la base des farines avant le développement de la culture des céréales, 1800 ans avant JC. Un petit bémol à cette manne de nourriture : le principal inconvénient des glands est leur teneur élevée en tanins qu’il est impératif d’éliminer en les faisant bouillir longuement et dans plusieurs eaux successives. On comprend mieux pourquoi les céréales ont eu la faveur des siècles suivants ! Attention, la consommation des glands à l’état brut s’est avérée mortelle pour les vaches qui les ont avalé en quantité, alors méfiance... Si vous êtes vraiment très motivé, vous pouvez essayer de réaliser la recette du pâté de glands proposée par François Couplan.

Outre les chênes, les hêtres donnent des faines, qui contiennent 4 graines semblables à des pignons de pin. La faine est une sorte de bogue ...moins féroce que celle du marron ! Les poils hirsutes de la faine et les picots de la cupule du gland rappellent que le chêne, le hêtre sont cousins du Châtaignier dans la grande famille des Fagacées. Vous n’aurez pas de mal à décortiquer l’emballage de la graine avec la pointe d’un couteau. Sous la coque, il y a encore une peau fine, brune à ôter comme pour les amandes, en raison de substance vaguement toxique. Une manière simple est de les faire griller à la poêle ce qui semble éliminer ce problème. Et c’est très bon ainsi !

Parmi les fruits à coque de la forêt, les noisettes sont un excellente source d’acides gras bénéfiques pour la santé, à négocier avec les écureuils qui sont les premiers servis ! Pour cela, je les savoure vertes dès le mois d’août, quand elles sont encore juteuses comme les amandes fraîches.

Marrons cultivés et châtaignes des bois

Tandis que le marron grillé se trouve dans tous les marchés de Noël en ville, la châtaigne se cache dans les forêts de Corrèze, d’Aveyron et du Var où l’introduction de l’espèce a permis à la population paysanne de se nourrir pendant des siècles. La plupart des vieux vergers étant abandonnés, les vestiges des vieux arbres greffés sont entourés de taillis sauvages où se mêlent les fruits des variétés oubliées depuis plus de 50 ans avec les fruits des arbres issus de semis naturels. Quelle différence entre les deux fruits ? C’est armée d’un couteau que j’ai découvert la complexité de l’épluchage des châtaignes ; tout ça à cause d’une petite peau fine (toujours la même !) qui s’insinue dans les replis des graines charnues, pas évidente à retirer du tout. Consternation... les châtaignes des bois sont en morceaux à la fin de l’opération. En fait, c’est quasi inévitable. Quant à lui, le marron cultivé offre une graine entière facile à peler, si bien adaptée à la confiserie pour la fabrication du marron glacé.

Les recettes pour les châtaignes ne manquent pas : bouillies, grillées, en purée, en farine ou confiture, etc.. La récompense de la patience est une saveur douce et fruitée qui se marie avec les pommes, les mijotés de carotte et légumes d’hiver, les myrtilles et le yaourt. Oubliée la dinde aux marrons très sèche ! Un délice, le sauté de porc aux châtaignes et sa sauce onctueuse, made in Massif Central… La châtaigne est plus nourrissante que la pomme de terre : bien pratique pour faire une diète sans les Solanacées, pointées du doigt par certains naturopathes. Très digeste, la châtaigne soigne les estomacs délicats et les muqueuses intestinales, mis à mal par les gastro et autre diarrhées. Elle est riche en glucides mais aussi en protéines et même en acides gras polyinsaturés !

A déguster rapidement après le glanage des fruits, car le ver de la châtaigne risque de vous prendre votre récolte si elle est stockée dans un panier. Il est présent dans les châtaignes ramassées à terre et grossit très vite ni vu ni connu à l’abri dans l’écorce du fruit. Pour s’en débarrasser, les paysans de la région de la Châtaigneraie (dans le Cantal) fumaient les châtaignes dans un « sécadou » (séchoir) à la façon du jambon, ou les faisaient tremper dans un bain de saumure, pendant plusieurs jours comme en Corrèze. J’ai essayé le congélateur pour la conservation des fruits écorcés ou blanchis : c’est très pratique sauf que le parfum des fruits n’est pas préservé. Les gastronomes ont tout intérêt à retrousser les manches et préparer la confiture de marrons ou les conserves de bocaux avec les fruits blanchis .
L’association nationale des Croqueurs de Pomme a édité un carnet spécial* consacré à la châtaigne avec les techniques de conservation et des recettes, que je vous recommande… de quoi faire un festin d’automne !

*Le carnet du Croqueur de pommes n°3 « le châtaignier » par Michel Gauthier

Récolte de Grattes Cul !

Voir en ligne : Safari-flore par Véronique Garcia Pays

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