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De l’eau & Du sol

samedi 1er juillet 2017, par Thomas Oak

N’oublions pas que le propos du « .Cueilleur -Culteur. » n’est pas seulement de redonner goût à la cueillette des sauvages en dispensant du savoir, mais aussi de comprendre comment le sauvage est à deux doigts de notre main en permanence autour de notre maison. La philosophie n’est donc pas, pour nous, de prendre son vélo ou sa voiture pour aller trouver un espace dit « naturel » et y faire sa cueillette sans s’occuper de ce que ce milieu devient ensuite, même si ce genre d’expédition a une réelle valeur.
La philosophie est de réaliser un circuit quotidien chez soi ou sur les chemins autour de sa maison et de le suivre au cours du temps, de le comprendre au mieux, de chercher à le protéger, de chercher à l’enrichir, à le complexifier pour qu’il soit plus résiliant et ainsi de se comporter en facilitateur de la nature plutôt qu’en prédateur et tout en récoltant de riches et savoureuses plantes, de participer quand même, à son humble mesure, à la conservation du milieu.
Aussi, comme pour avoir une nature généreuse il convient d’enrichir le sol, avec de l’eau, des bactéries, de l’humus et de s’assurer de l’augmentation de la variété et de la vitalité des plantes, nous explorerons au fil des numéros cette « Permaculture » qui n’a pas pour premier but de produire, mais de vivifier la nature environnante afin que les prélèvements soient meilleurs et ne soient pas une charge pour la végétation.

Dans cet article, nous allons de parler de l’eau. L’eau qui tombe en abondance dans nos contrées quel que soit l’endroit humide ou sec où nous habitons, mais nos sols, dans leur grande majorité, sont devenus non absorbants et peu couverts et laissent donc partir rapidement une denrée précieuse et vitale. Quel gâchis de la faire partir aussitôt vers le réseau pluvial !

Par ruissellement, elle se retrouve très vite dans les rivières où, si l’épisode pluvieux est important, il concocte des catastrophes qui alimentent les journaux de 20H.
Ce qui ne coule pas s’infiltre rapidement vers le sous-sol, faute d’humus pour faire éponge, et par évaporation expresse, faute d’un couvert végétal suffisant qui enlève aux rayons du soleil l’accès direct au sol.

En aplanissant nos pelouses et jardins, en enlevant au maximum les adventices qui protègent les petites plantes, en ne chargeant pas assez les sols en débris végétaux, en ne récupérant pas l’eau de pluie où cela se peut, nous créons nous-mêmes la sécheresse de nos sols et la nécessité d’arrosage du jardin.… et donc de son lessivage … Bref la catastrophe annoncée.

Un personnage comme Sepp Holzer nous écrit dans ses livres avec justesse qu’il faut retenir l’eau au maximum sur sa propriété. Entendez pour nous : dans notre espace de cueillette. Selon ses dires, il convient de créer des retenues d’eau avoisinant 10% de la surface totale de notre « propriété » !

Même si cet objectif a priori louable semble difficile à atteindre, il n’empêche qu’il faille au moins commencer marche après marche à retenir entre nos doigts l’eau qui coule du ciel, pour le bonheur des plantes.

Pour avoir exploré cette dynamique pour notre ferme, je peux vous offrir quelques pistes glanées de ci de là sur les livres ou Internet et pour certaines testées en « live ».

1 – Retenir l’eau qui coule.

Tout doit être bon pour ralentir le parcours de l’eau de pluie et définir des lieux de stockages. A ce titre, deux zones :
 les zones bâties sur lesquelles l’eau coule sans s’infiltrer : toits, terrasses, dalles de ciment, cours empierrées, etc …
 les zones végétalisées ou végétalisables sur lesquelles vous accumulerez au maximum des matières végétales (déchets verts broyés, pailles, etc) qui deviendront de l’humus qui sert d’éponge et retient l’eau dans sa texture et où il conviendra de faire des trous et rigoles qui retiennent et ralentissent son départ.

Pour les premières, il sera bon, à l’endroit où se drainent ces importantes quantités d’eau, de les stocker.

 Dans la cave ou sous la terrasse avec des grandes citernes plastiques type matelas d’eau ! Pour une utilisation au jardin ou une utilisation domestique. (https://www.la-citerne-verte.com).

 Les récupérateurs d’eau de pluie qui se placent contre le mur le long de la descente de gouttière. (http://www.oogarden.com/cat-467-Recuperateur-eau-de-pluie.html)

 Une vraie citerne à l’ancienne si vous avez la chance qu’elle existe chez vous ou si vous décidez de la construire !

Une colonne de stockage d’eau de pluie branchée sur la gouttière, idéale pour l’arrosage des plantes en pot ou des semis. Notez que le surplus part vers une petite retenue sous le bosquet. Le fouillis végétal du devant de la maison héberge de la menthe, du pissenlit, de l’alliaire, de la lampsane, de la benoîte, de la potentille, du millepertuis ... Un vrai saladier !

Ces solutions ont l’avantage de constituer une réserve d’eau qui ne s’évapore pas, qui peut servir à arroser le jardin ou à des tâches ménagères qui ne nécessitent pas une eau absolument propre (stérile ?). Elles sont aussi intéressantes dans un milieu contraint en espace.

Mais si le lieu est ouvert, il est pertinent de faire des réserves à l’air libre parce qu’elles permettent alors à l’eau de rester dans le cycle naturel de la vie.

Le premier point est de ralentir l’eau. Notre propension à aplanir nos surfaces pour qu’elles soient plus « pratiques » ? Plus « belles » ? Plus mécanisables … est un piège à sécheresse.

Dans une pente, nous avons enterré un vieux tas de bois : il absorbe l’eau et constitue ainsi une réserve et sa fermentation produit de la chaleur. En faisant une butte en arc de cercle dans l’axe de la pente cela forme un fossé profond qui retient l’eau de pluie et assez ombrée pour donner ici au milieu d’une pente plein sud une zone plus fraîche et plus humide.

Réapprenons à faire des creux légers qui suivent les courbes de niveau, qui retiendront l’eau quelques heures ou jours de plus, elle s’infiltrera ou s’évaporera, mais n’alimentera pas la crue de la rivière. Sur Youtube, vous pouvez voir la vidéo d’un africain qui a dans le sahel creusé sur de la latérite aride des petites dolines dans lesquelles il a entassé des débris végétaux et cela a suffit à permettre la pousse d’arbres dans ce creux et à régénérer une forêt en trente ans. Chez nous, la culture sur buttes organisées selon les courbes de niveau est à ce propos très efficace pour un jardin, pour des platebandes qui pourraient être circulaires avec une cuvette centrale… mais ce peut être aussi une partie de votre pelouse qui est aménagée ainsi, si les pentes sont molles, la tondeuse passera quand même. Oui mais l’herbe poussera davantage ! Bien sûr n’oubliez pas qu’à la fin on recherche le pissenlit et le plantain qui ne manquera pas de s’installer (cf cueilleur culteur n°1) et que l’on fait notre deuil de la pelouse serviette (verte l’hiver, mais jaune paillasson l’été ! à moins d’un copieux arrosage parfois interdit par le préfet !).

Tous les systèmes sont bons pour casser la pente et distribuer l’eau là où est votre végétation.

La ralentir ne suffit pas, quand c’est possible, il convient de la stocker dans des retenues. Pas forcément besoin, comme le décrit Sepp Holzer dans ses livres, de créer de vrais étangs ; c’est beau mais pas à la portée de tous.

Un simple trou dans la terre grattée à la pelle et à la pioche fait une petite mare dont souvent le sol ne sera pourtant pas étanche et votre point d’eau aura du mal à ne pas s’assécher ; ce qui sera dommage et ne permettra pas à ce point d’eau de contenir toute la vie qu’il devrait. Mettre une bâche permet de garder l’eau plus longtemps mais l’empêche de s’infiltrer dans le sol, ce qui est pourtant notre but premier.

Notre plus grande réserve, bâchée, reçoit l’eau du toit de deux chalets. Plus de 100 poissons y vivent et c’est l’abreuvoir préféré des hirondelles ! Les grenouilles y pondent régulièrement, les végétaux petit-à-petit la colonisent sans pour autant disposer encore d’une eau claire. Elle n’alimente pas le sol en elle-même, mais à chaque pluie le surplus s’écoule emmenant dans le jardin en contrebas eau et matière organiques.

Dans la ferme, j’ai adopté une formule mixte qui permet de garder une petite réserve d’eau permanente et de laisser une partie de la surface du point d’eau en terre dans laquelle l’eau pourra s’infiltrer et les racines pourront venir se servir. Je fais un bassin à deux niveaux, le plus profond est pourvu d’une bâche, la partie la plus haute est en terre battue, la pente est douce du bord vers la partie la plus profonde. Cette précision est importante car je mets des poissons rouges (carassius auratus) dans ces retenues et quand le niveau haut leur a permis d’aller partout, la baisse du niveau les conduit naturellement vers la partie bâchée.

Toute réserve d’eau est une réserve à larves de moustiques et les poissons rouges s’en régaleront. Nul besoin d’autre nourriture si le volume par poisson est suffisant (20 litres environ par petit poisson de moins de 5 cm), il convient aussi que cette réserve ait une certaine profondeur (mini 50 cm), dans une partie ombrée de votre trou, pour que les écarts thermiques ne soient pas importants ; le soleil fait vite monter la température et l’oxygène pour les branchies de nos poissons est moins présent dans une eau chaude.

Dernière création de cet hiver : par le tuyau coule l’eau d’un toit végétalisé qui tombe dans une réserve de 100 litres environ avec élodées et deux petits poissons rouges. En cas de pluie, toute la surface est couverte de 30 cm d’eau supplémentaires, l’excédent peut s’écouler dans une rigole qui parcourt la partie amont d’une petite butte. En haut : retenue juste faite en bas quelques mois plus tard, la végétation spontanée et moins spontanée s’installe tranquillement : soucis, blé, gaillet, roquettes, tomates, petits pois, fraises, menthe, oseille, potentille, achillée, centaurée, etc.

La présence des poissons est importante pour ne pas créer un marais sans cycle de vie chez vous et importante parce que dans certains départements, les autorités obligent à combler ces trous d’eau pour ralentir la progression en France du moustique tigre (Aedes aegypti, vecteur de maladies virales émergentes comme le virus chikungunya) … les poissons rouges vous dédouanent de cette présomption.

Après on peut discuter de l’opportunité de désertifier nos tours de maisons pour espérer contrecarrer une espèce en créant des désordres écologiques finalement plus grands … mais bon, refaisons notre jardin avant de refaire le monde !

2 – Rendre cette eau vivante.

Une fois réalisée, cette mare contiendra de l’eau, des insectes, des poissons, quelques plantes aquatiques que vous aurez mises (lentilles, élodées, iris, queue de lézard, etc.). Exceptionnellement on ne cherchera pas forcément leur aspect comestible car les milieux aqueux dormants sont incertains par les bactéries de décompositions et les parasites. Mais aussi vous verrez sûrement arriver plein de vie que vous n’aviez pas prévu : libellules, grenouilles et oiseaux, etc …

Vous pourrez, sur une partie de la bâche peu profonde, mettre de la terre pour faire une zone marécageuse sur laquelle vous installerez d’appétissantes plantes de bords d’eau : prêle, épilobe, renouée poivre d’eau …et même du riz, C’est ainsi que j’ai eu une récolte de 100 grains de riz en piémont pyrénéen (riz de monsieur fukuoka l’auteur de "la révolution d’un brin de paille" … excusez- moi du peu !).

Les bords de la mare encore surélevés par la terre que vous aurez retirée du trou seront de parfaites butes à complexifier et aménager à votre guise en fonction de l’éloignement de l’eau (menthe sur le bas par exemple) et de l’orientation. Votre imagination est la seule limite : morceaux de bois comme réserve d’eau et de chaleur par sa décomposition, pierre qui protège du vent et emmagasine la chaleur du soleil, etc.

Le temps et l’expérience vous permettront de suivre au mieux l’évolution de ce milieu dont vous prendrez bien soin de garder l’aspect semi sauvage (souvenez-vous orientation de la nature …pas contrôle !). Les effets de cette réserve se font sentir sur quelques mètres, c’est peu mais tellement important comme point de vie dans un lieu !

Bien sûr vous pouvez voir plus grand, plus beau, plus créatif, plus baignable dans une vraie piscine naturelle !

Mais je suis un adepte des brouillons et petits pas ! Commencez par une mare d’un mètre de profondeur et de quelques m2 à la réception des gouttières de votre toit, testez vos capacités d’organisation et d’observation, voyez les avantages et inconvénients de ce que vous avez fait puis si vous avez la place, projetez plus grand … Sans perdre de vue le but : retenir l’eau donc favoriser la vie autour de vous !

L’eau du ciel ..et des hommes ...Sic

L’eau qui tombe est un cadeau du ciel, par l’évaporation elle a laissé ses impuretés sur le sol et devrait être claire ... mais dans l’air, elle récupère les déchets des hommes.

Il y a les pluies acides (ayant absorbé les déchets de nos combustions diverses) et il y a quantité de pesticides et herbicides, en particulier le Glyphosate (dont le fameux roundup). Les quantités utilisées ayant été multipliées par 20 en 20 ans, quasiment toutes les pluies en contiennent maintenant et pas étonnant de voir des feuilles rabougries après une pluie d’été ! Aussi nous avons transformé l’eau de pluie en poison ... vive la culture hydroponique avec de l’eau filtrée !!! (LOL) SVP, messieurs et mesdames de la commission de Bruxelles cessez vos liaisons dangereuses avec les lobbies de la chimie !!!

L’eau qui passe ...

Dans le corps de l’article, nous avons parlé de l’eau qui tombe du ciel... Mais il y a l’eau qui ne fait que passer dans de l’air humide, certains systèmes ingénieux réalisés pour les déserts tentent de retenir cette eau insaisissable.
Mais on peut, chez soi, faire un système comme celui de la photo ci-dessus, qui permet de récupérer un peu de rosée pour confectionner des élixirs floraux... Mais rien ne sera jamais aussi efficace que ... les plantes comme nous le montre l’alchemille de la photo ci-dessous.
Aussi rien de tel que de laisser dans son chez-soi le sol couvert de végétation pour recueillir cette eau qui sur un sol nu ne ferait que passer ! Et de ne désherber ou retourner le sol qu’en cas de nécessité.

Catastrophe en cours plus de pesticides et moins d’eau :
 http://www.lemonde.fr/pollution/article/2017/10/17/la-qualite-de-l-eau-se-degrade-encore-en-france_5201907_1652666.html

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