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L’ortie, sensiblement amicale ! - 9

samedi 8 septembre 2018, par Laurent Winsback

Elle est l’indésirable

Elle est l’indésirable par excellence de tout jardin soi-disant civilisé. Qu’a donc à nous dire de si important cette sauvageonne hirsute, pour manifester un tel empressement à s’installer ostensiblement dans notre sillage ?

Sous ses airs peu engageants, l’ortie témoigne avec insistance de ses nombreuses vertus. Il suffit de prendre le temps de l’observer pour mieux la comprendre, et s’autoriser grâce à elle un premier pas dans la communication sensible avec le monde végétal.

A première vue, l’ortie n’est pas une plante facile… Mais cette réaction on ne peut plus épidermique à son encontre en dit long sur notre tendance à vouloir contrôler la nature plutôt qu’à la comprendre. Car la belle est sans doute l’une des ambassadrices les plus talentueuses du monde végétal, par la simplicité et l’efficacité avec laquelle elle parvient à exprimer qu’elle est et ce qu’elle nous offre.

Qui s’y frotte… ne s’y pique pas forcément !

Autant commencer par le plus désagréable : la piqûre. Soudaine. Instantanée. Généralement non désirée, sauf à vouloir tel Saint-Benoît éteindre par ce feu extérieur sa libido intérieure. L’ortie signale sans ambages sa présence à celui qui ne l’avait pas remarquée, ou qui l’aurait oubliée. Piqûre de rappel, souvent perçue comme une forme d’agressivité, là où il ne s’agit que d’une invitation à la pleine conscience.

Autorisez-vous à cueillir une ortie à mains nues, en la caressant dans le sens du poil avec votre entière attention, et vous aurez la surprise de ne pas vous faire piquer. Et puis quand bien même ! La brûlure ne dépasse généralement pas le seuil du simple désagrément. Un coup de fouet qui nous indique sans équivoque les bienfaits toniques de la plante.

L’ortie dynamise, elle met en mouvement, elle redonne de l’énergie à qui sait l’apprivoiser. Son feu, qu’elle exprime dans le rouge à la base de ses tiges, comme dans ses feuilles aux dents acérées, n’incite guère à la stagnation. C’est donc sans surprise qu’elle renforcera notre organisme dans ses capacités de mise en mouvement, aussi bien au niveau de notre respiration que de notre circulation sanguine. Les reins, sièges de l’énergie vitale en médecine chinoise, trouvent même en elle un effet non seulement tonique mais aussi réparateur !

Marquer son territoire.

Jamais isolée, la plante quadrille le terrain en formation militaire savamment agencée. Ses rhizomes s’étendent sous terre à l’horizontale avec la même vigueur que se dressent ses tiges à la verticale. Parfaitement équilibrée, l’ortie semble ainsi tirer sa force de son union avec elle-même, et peut aisément recouvrir certains espaces de sa seule présence végétale.
Gardienne protectrice de ce territoire, elle n’en revendique pas pour autant l’exclusivité et le partage volontiers avec une foule d’insectes aisément observables. Cette générosité manifeste se retrouve dans ses propriétés médicinales : elle nous offre à l’intérieur ce qu’elle nous montre à l’extérieur, à savoir cette capacité à occuper nous-même le terrain et à ne pas nous laisser envahir. Rôle dévolu dans notre biologie au système immunitaire, qu’elle seconde sans sourciller.

L’approche sensible du végétal ne permet certes pas de détecter sa teneur spectaculaire en vitamines (encore que, son goût moitié minéral moitié animal nous fournisse quelque indice de la richesse de sa composition), mais force est de constater qu’elle est bel et bien au diapason de ce que nous révèlent les analyses scientifiques...

Alimentaire, médicinale, et pédagogue !

Révélatrice de qui elle est par sa façon de pousser, l’ortie nous en dit aussi beaucoup sur elle-même, et sur nous mêmes, par l’endroit où elle pousse. Un tas de fumier abandonné la comblera d’aise, et il suffit d’être un tantinet observateur pour constater à quel point elle raffole des terres riches en matière organique. Engrais remarquable, elle est aussi sur un plan plus subtil la bio indicatrice de notre sédentarité, et de notre contribution au déséquilibre des sols avec des terres appauvries d’un côté, et surchargées d’azote de l’autre.Non contente de nous nourrir et nous guérir par sa flamme intérieure, dame ortie s’avère ainsi révélatrice de nos excès… Ce qui ne contribue certes pas davantage à sa cote de popularité, mais rend d’autant plus urgent et évident l’intérêt d’être à l’écoute de son message.

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