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La Lactofermentation

Mes Astuces

vendredi 12 mars 2021, par Thomas Oak

La lactofermentation est un procédé très ancien, très utilisé dans tous les pays, facile et peu onéreux pour conserver les légumes. Il s’agit de faire fermenter à partir de bactéries dites lactiques (1) les légumes dans une solution salée. Le résultat est une préparation salée et acide, riche en probiotiques et enrichie en vitamines C et B essentiellement.

Chez nous, ce moyen a été supplanté par le réfrigérateur et pourtant ce dernier ne joue pas dans la même catégorie. Aussi, nous avons assez régulièrement oublié que la choucroute est d’abord et avant tout une lactofermentation, mais qui ne donne toute sa saveur que dans la choucroute crue. Toutes les préparations stérilisées ont perdu une grande partie de leur intérêt.

Nous ne savons souvent plus que les cornichons étaient des « pickles » lactofermentés. Maintenant, ils sont régulièrement passés à la soude pour les attendrir, baignés dans l’acide pour se conserver, mais complètement stériles et avec des conservateurs. Alors que dans la lactofermentation, les bactéries ont ramolli les cornichons par leur travail, ont enrichi la solution en vitamines et autres produits issus de leur métabolisme et l’acidité résulte de l’accumulation de l’acide lactique quand la fermentation se termine. On ne parle en fait pas du tout du même aliment … ils ne sont pas comparables.

Aussi la fermentation des végétaux (cela ne se limite pas aux légumes) est un moyen de conservation, un moyen de rendre plus vivant l’aliment, mais c’est aussi un moyen de rendre agréable à manger des parties de végétaux qui d’habitude sont évitées pour leur caractéristique gustative difficile.

Si le principe est assez simple : mettre dans un bocal des morceaux de légumes dans une solution salée et fermer pour au moins quinze jours avant de consommer ou mettre en conserve pour quelques mois à température ambiante (moins de 20° de préférence quand même), Il convient de bien comprendre quelques principes pour ne pas avoir à jeter quelques pots et pour être satisfait du résultat.

Après deux ans de tâtonnements, je suis arrivé à une façon de faire sûre et extrêmement jubilatoire dans la qualité gustative au point que souvent, mon repas du soir n’est constitué que de la mixture dont nous allons dérouler maintenant la réalisation : un grand saladier plein de légumes, salades, feuilles, fruits fermentés, graines et épices.

Les légumes classiques :

Ingrédients :

carottes, betteraves, choux, (fenouil, navets, radis), eau filtrée ou eau minérale (sans chlore), sel pur (gros sel marin, mais pas sel en poudre avec additif ) (https://revolutionfermentation.ca/blogs/legumes-fermentes/sel-saumure-lactofermentation) ; un starter de fermentation (choucroute crue à acheter en magasin bio ; ou un peu de votre dernier bocal lactofermenté).

Dans la préparation finale que je propose, nous allons ici préparer le gros du volume avec des légumes connus pour leur facilité à fermenter.
Prendre par exemple un grand pot à conserves avec le système de fermeture caoutchouc. Préparer des carottes, des betteraves, des choux. Laver, peler et les râper assez finement. Attention, ne pas hésiter à en préparer beaucoup car en tassant dans le pot, on met finalement souvent plus de légumes qu’on pense.

Mains propres (lavées mais sans produits tensioactifs), mettre dans le pot les légumes râpés, entre chaque couche mettre un peu de sel et systématiquement, au fur et à mesure du remplissage, tasser fortement les légumes pour qu’ils commencent à exprimer leur liquide intracellulaire, nutriment important pour les bactéries lactiques. La quantité de sel finale doit être entre un et quatre grammes par kg de légumes. Il faut se rapprocher des quatre grammes pour une conservation longue. Personnellement, j’avoue que je ne mesure pas vraiment …. J’insiste cependant vraiment sur le fait qu’il faille tasser fort avec la main. Une fois à 1 ou 2 cm du bord, il convient d’assurer un système de couverture des légumes qui les empêche d’être à l’air libre (plastique, bois, caillou). Mais ici, je trouve qu’il est beaucoup plus élégant de mettre sur le dessus une couche de légumes déjà lactofermentés, qui eux ne craignent pas l’air, empêcheront vos légumes de contacter l’air et surtout qui ensemenceront le bocal en bactéries correctes pour la lactofermentation. Parce qu’un constat navrant mais constant est que les sols se sont appauvris en bactéries et que les légumes ne sont pas toujours assez riches en ferments par eux-mêmes comme ils l’ont été jadis.

Ensuite, faire couler lentement de l’eau pour finir de chasser toutes les bulles d’air et réaliser ainsi dans le pot la saumure nécessaire comme milieu pour les bactéries lactiques.

Mettre le pot dans un plateau, ou un récipient capable de recueillir le liquide qui ne manquera pas de sortir du pot pendant au moins trois jours. Ne vous inquiétez pas si ce liquide se couvre d’un voile blanc, ce sont les bactéries. Quand il ne sort plus de liquide, rouvrez le pot et rajouter de l’eau pour arriver à nouveau au bord, avec un peu de sel si vous avez rajouté beaucoup d’eau. Laisser ensuite le pot fermé au moins une dizaine de jours à température ambiante (2) avant de commencer à vous servir.

Comment savoir si la préparation est bonne ? Rapidement vous prendrez l’habitude :

  On le voit à la texture des légumes qui restent fermes. Si un germe de putréfaction a pu se développer, les légumes sont mous et visqueux (Alors …compost).

  A l’odeur, même forte à l’ouverture du bocal, une odeur aromatique se dégage que vous reconnaîtrez aisément. Dans le cas contraire odeur de « pourri », il ne vous reste plus qu’à faire du compost.

  De reconnaître si un champignon s’est développé, en général, il laisse une couche bleu/vert ou noir, flottant sur les légumes : Compost.

Mais en procédant comme indiqué, les accidents sont rarissimes avec un peu d’habitude.

Les autres végétaux :

Prunelles, l’astringence du fruit disparait et cela en fait un met succulent.

Les tomates vertes ne sont comestibles que cuites ou en petites quantités lactofermentées.

Si la préparation précédente servira de base à mon futur plat lactofermenté, je vais préparer de nombreux petits pots (à caoutchouc ou plus simplement avec un simple couvercle qui visse) avec des végétaux variés. Le principe de réalisation restera exactement le même, mais je préfère individualiser les expériences. Le fait de râper n’est alors absolument pas systématique, on peut faire des morceaux ou garder entier des petits fruits.

On remplit le pot on tasse si le végétal le permet, on met le sel (pur), la petite couche de légumes déjà fermentés pour fermer, et enfin l’eau filtrée. On ferme le couvercle, pendant trois jours, cela déborde et on fait bien attention à reremplir et resaler (plus le pot est petit et plus c’est important).

Que peut-on fermenter ?
  L’ail, très bon moyen pour avoir un ail moins piquant mais très savoureux.
  Du citron.
  Des pousses tendres de sapins.
  Des prunelles, des alises des bois, des cynorrhodons (entiers mais in fine on ne mangera que la pulpe), des azeroles…
  De la fleur de banane coupées en petits dés, des fleurs d’ail des ours, des feuilles de verveines citronnées.
  Des fleurs de poireaux
  Des cornichons, des tomates vertes, des pickles de navets, de radis, etc …
  Des siliques de radis, des fleurs de moutarde, etc …

Tellement de choses en fait …. Seule l’imagination manque le plus souvent. Et il est tellement plaisant et gratifiant de découvrir dans la haie les alises que l’on n’avait jamais calculées et pensé comestibles et de les retrouver ensuite dans un plat tellement varié, issu des différentes cueillettes de choses que l’on regardait à peine.

Poivre du sichuan maison… pas encore gouté …

Ail, excellent moyen pour en avoir toujours sous la main. Gout et texture différent mais délicieux.

Les kaktudis :

Recette coréenne faite avec de la poire et du piment. Même préparation : morceaux de poire, sel, eau, je mets en général du piment d’Espelette pas trop fort et le bouchon de fermenté pour fermer. Cette préparation une fois démarrée se conserve plutôt au frais. Le mélange sucré, salé, pimenté est absolument surprenant mais délicieux. Je l’ai réalisé avec des pommes, des casseilles, des groseilles … résultat superbe.

Le citron, libère ainsi son parfum, coupé en petits dés ensuite dans la salade complète, tout se mange. Ici un essai avec en plus du piment d’espelette.

Les préparations vinaigrées :

Le principe mis en action est similaire. Il vous faut un vinaigre vivant, c’est-à-dire plein des bactéries qui sécrètent alors de l’acide acétique. Dans ce cas certaines préparations se sont prêtées à la conservation vinaigrée : fleur de poireaux, siliques de radis, fleur d’ail des ours, jeunes pousses de sapin.

La préparation finale :

Il se trouve que directement sorti du pot, nos nez et nos papilles font un peu la tête sur les composés volatiles qui se sont accumulés. Alors on a intérêt à aérer les préparations avant de les consommer. Et puis comme pour la salade sauvage, il n’est guère intéressant d’avoir un seul goût. Aussi, je prends un saladier (en verre ou céramique de préférence) assez grand et je fais une préparation :
  Une grande quantité de la première préparation (carottes, choux, etc …)
  Un peu de chaque pot réalisé par ailleurs (prunelles, pousses de sapin, ail, citron, fleur d’ail des ours, silique, etc …)
  Des graines selon vos envies : de courge, de pin, de tournesol, de chanvre, de lin, de chia, de lupin etc …
  Assaisonnement : surtout pas de sel, poivre possible, mais de mon point de vue ce qui fonctionne le mieux ce sont les graines de fenouil, la poudre de fenu grec, la poudre de gingembre, ou le cumin, l’élichryse)
  On peut y rajouter le fond de salade sauvage non consommé, le restant des carottes râpées qui n’a pas été fini, le reste du concombre, le morceau de navet qui se dessèche dans le compotier, le restant de thé vert que personne ne consomme, les morceaux d’algues de la salade du pêcheur, etc. (mais pas de légumes cuits ou de végétaux avec de l’amidon).

On n’hésite pas à y mettre le jus de fermentations des bocaux. On mélange le tout et on place le saladier à l’air libre au réfrigérateur au moins 24 heures. Ensuite on peut se servir à loisir. Dès qu’il commence à se vider, inutile de le nettoyer, on recharge avec toutes les préparations, on rajoute des graines, on réassaisonne … et c’est reparti, sans fin.

Ce mélange peut être un repas à lui tout seul, on le mange tel que, ou un peu huilé, ou avec un tartare d’algue ou un pesto. On peut aussi le diluer avec une salade sauvage, une mache, des carottes râpées fraîches.

Bon Appétit.

Ps : en suivant la recette polonaise des cornichons offerte par les éditions debowska. Une tuerie … Retrouvez cette recette dans l’article paru dans le cueilleur culteur N°15.

(1) Selon wikipedia, suivant la classification taxonomique courante3, elles appartiennent au phylum Firmicutes, la classe Bacilli et à l’ordre Lactobacillales, comportant les familles suivantes : Aerococcaceae, Carnobacteriaceae, Enterococcaceae, Lactobacillaceae, Leuconostocaceae et Streptococcaceae. Les Bifidobacteriaceae de l’ordre des Bifidobacteriales sont aussi classées parmi les bactéries lactiques.

(2) Ambiante mais moins de 20°C sont recommandé et certains les laissent à l’obscurité ce que je n’ai jamais fait.

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